Sur l'ile magique, une vallée tout
aussi magique, la VAURÉAL.
NOTE (2010-08-19): ce texte a été écrit en 2000 et les photos sont des diapositives numérisées. Les informations sont toujours valides. Pour des photos plus actuelles, voyez : Anticosti 2010.
Petite histoire
Ile légendaire, Anticosti en fait rêver plusieurs. Pour certains,
elle leur fait entrevoir un séjour de chasse ou de pêche
inoubliable. Pour d'autres, le relief, l'isolement et l'atmosphère unique
de cet environnement insulaire appellent en eux le désir d'en percer le
mystère, ou du moins de le partager.
Immense vaisseau enroché, Anticosti ne passe pas inaperçue
dans le golfe St-Laurent. Mieux connue pour ses milliers
de cerfs de Virginie, descendants de ceux importés
par Henri Menier, cette ile recèle tant d'autres
beautés, tant d'autres unicités, tant d'autres secrets.
Le sentier
En fait, il n'y a pas de sentier proprement dit ;
on suit tout simplement le lit d'un ruisseau intermittent
puis on remonte le long des berges de la rivière. Il
serait très difficile de se perdre !
Le stationnement du canyon est indiqé le long
de la trans-Anticosti, seule route qui traverse l'ile
de part en part. Ne cherchez pas de vrai stationnement,
pas de lignes blanches, pas de parcomètres
! C'est un bout de chemin dégagé.
Suggestion importante : n'allez surtout pas
admirer la chute à partir des belvédères
avant de descendre ; le charme serait rompu.
Vous y irez en revenant, pour compléter la partie
touristique de vos photos.
Si le panneau indicateur est encore tombé (!), marchez
dans le prolongement du chemin d'accès, vers la droite.
L'usure du sol vous tracera le chemin. Vous descendrez
alors dans le lit d'un ruisseau. Il est généralement
à sec en été, mais essayerez donc de
vous y imaginer lors de la crue printanière
! Une fois rendu en bas, vous tournez à droite pour
remonter la rivière.
Si vous tournez à gauche, espérons que vous
vous rendrez compte de votre erreur avant d'avoir
franchi la dizaine de kilomètres qui vous sépare
de Vauréal-la-mer...
Mais, trêve de plaisanterie. Passons aux choses sérieuses.
Passons plutôt au
choses magiques, voire même insolites.
D'abord une vague impression vous envahira dès votre
arrivèe dans le fond de la vallée. Une impression
qui vous questionnera, qui vous intriguera. Vous
arrêterez, écouterez, tenterez de percevoir
un indice. Il manque quelque chose. Il manque un
élément qui vous a accompagné tout le
long de la trans-Anticosti. Mais quoi donc ? Bientôt
vous comprendrez ; vous vous rendez compte que le
trimballement de la camionnette sur cette interminable
route de terre ne résonne plus dans votre tête.
Vous êtes en train de découvrir... le silence
! Laissez le vous pénétrer, laissez le se répandre
en vous.
Puis percera peu à peu le roucoulement de la rivière.
Une eau fraîche et pure à 100%, comme dans la
publicité, mais gratuite. S'ouvrira alors l'invitante vallée,
comme deux mains tendues offrant un des plus
beaux spectacle naturel du Québec.
Allez y !
A différents endroits, vous aurez à traverser
la rivière. Si l'eau est basse, pas besoin de vous
déchausser, sinon... L'eau n'est pas froide ; 'est frette en
titi!
Vous dépasserez bientôt le premier tournant majeur
; l'entrée pédestre de la vallée disparaîtra
derrière vous. La falaise se redresse,
la pente augmente, comme pour vous signifier
que vous serez bientôt prisonnier de ses parois,
et de son charme. La vallée se
fait aussi plus étroite, et vous devenez peu
à peu à la merci de la fragilité de
la roche sédimentaire parfois instable de la falaise qui
risque de dégringoler sans
avertissement. Mais calmez donc un peu votre
anxiété. Relaxez. La Vauréal est
bienveillante !
Si le temps est chaud et ensoleillé, vous apprécierez
ces petits boisés répartis
tout au long de la vallée, oasis de
fraîcheur sèche (si vous préférez la
fraîcheur humide, la rivière est à vous...).
Quelques pauses, ici et là, vous imprégneront
de l'atmosphère unique du canyon.
Vous serez tellement absorbé par la magie de cette
vallée que vous ne chercherez peut-être même
pas à découvrir les grottes qui percent la paroi,
un peu avant d'arriver à la chute. Ce sera pour une
autre occasion (on se dit ça à chaque fois !).
Et cette chute ! Avant le dernier détour, vous l'entendez
déjà gronder du haut de sa falaise; vous l'entendez
couler dans votre corps, dans votre esprit. Ce bruit
sourd qui laisse entrevoir en période de hautes eaux
une gigantesque puissance naturelle. Votre cœur frémira
d'anxiété en se demandant ce qu'il pourrait
bien arriver si une inondation survenait. Vous vous
rendrez alors compte que vous êtes en transe, que la
force de la Vauréal veux vous engloutir à jamais, que...
excusez-moi, je "capote" un
peu.
La pointe du dernier tournant est caractéristique
et se reconnaît sur toutes les photos, par le profil
de sa corniche.
Serait-ce les tours de garde d'un château quelconque
?
Puis, "la" voilà,
là-bas ! Quelques pas encore et vous entrerez
dans le palais de la majesté Vauréal. Un palais
aux murs infranchissables. Un palais doté d'une extraordinaire
fontaine, d'une vue panoramique sur l'émerveillement.
Ne cherchez plus ni chants d'oiseaux, ni froufroutement
du vent, ni bruit de pas ; surtout en période de
hauts débits , l'immense cascade sonore
rempli tout l'espace auditif. Vous comprendrez alors
pourquoi on a choisi la chute Vauréal comme le véritable
symbole photographique d'Anticosti : parce qu'elle
est là depuis des millénaires. Selon les années,
sa majesté est
parfois plus calme, se laissant même photographier
de face!
Peut-être vous viendra-t-il cette réflexion... fondamentale.
Habituellement, une chute gruge
peu à peu la vallée qu'elle façonne ; cette
dernière sera donc dans le prolongement de la
chute. Mais la chute Vauréal n'est pas dans
le sens de sa vallée ; elle lui est perpendiculaire
! Reconsultez la carte.
Alors comment a bien pu s'éroder la portion
de la vallée qui va au-delà de la chute?
Les crues printanières de la Vauréal
sont-elles si terrifiantes ? On le dit, oui.
Ou alors, la rivière coulait-elle à ses débuts
géologiques non pas dans son lit actuel, mais
bien plus dans l'extrémité sud du canyon (
la plus basse flèche, sur la carte ) ? Mystère
et boule de gomme... ou d'épinette !
Et viendra l'heure du retour. Ne soyez pas déçu,
car vous découvrirez une autre vallée ; vous
la verrez d'un autre angle!
Après la spectacle de la chute, profitez en donc
pour mieux apprécier la grandiosié de la vallée,
de ses parois, de sa roche. Vous vous sentirez tellement
petit, face à cette nature. Et c'est ce que nous
sommes tous face au paysage : petits.
En terminant votre randonnée, quoi de plus normal
que d'aller faire un tour sur les belvédères,
indispensables structures qui gâchent un peu
la vision et l'isolement lorsqu'on est au
rez-de-chaussée du palais, mais qui permettent
d'en avoir une si belle
perspective d'en
haut. Mais ne quittez pas les belvédères, ou
sinon gare à vous, vous risquez d'accéder
très rapidement au palais...
Accès et difficulté
L'accès au canyon représente un bon deux heures
de route de Port-Menier et une demi-heure du camping
Wilcox, à pointe Carleton.
La randonnée comme telle est relativement facile,
et très facile une fois dans la vallée. Le sentier
(lorsque visible) est constitué de roches parfois
coupantes ; de bons souliers ou bottes de marches
sont préférables, mais des espadrilles de qualité peuvent
faire l'affaire. Prévoyez une petite collation, et
une boisson rafraîchissante si vous vous méfiez
de la qualité de l'eau de la Vauréal (si l'auteur
de ces lignes peut en parler aujourd'hui, c'est qu'elle
doit
être bonne, puisqu'il en a bu !). Si le temps est
chaud et le vent absent, la vallée peut se transformer
en fournaise ; attention au soleil ! Comptez sur
un bon trois heures de randonnée, ou plus, dépendant
combien de temps vous vous attarderez dans ce royaume du silence.
Longue vie à sa majesté la Vauréal !